En Thaïlande, la politique rizicole est dans le collimateur

Le programme de soutien aux prix du riz mis en place par le gouvernement subit un assaut de critiques.

Le programme de soutien aux prix du riz mis en place par le gouvernement subit un assaut de critiques.

Quand elle a pris la tête du gouvernement en août 2011, Yingluck Shinawatra a relancé le programme de soutien aux prix du riz qu’avait mis en place son frère, Thaksin lorsqu’il était Premier ministre de Thaïlande  entre 2001 et 2006. Dans sa nouvelle version, ce complexe système d’achat du riz par l’Etat directement des mains des paysans fixe des tarifs entre 40 et 50 % supérieurs à ceux du marché : 15.000 bahts (395 euros) la tonne pour le riz paddy et 20.000 bahts (526 euros) la tonne pour le riz jasmin. Après six mois d’application, ce programme a abouti à l’accumulation dans des entrepôts et des silos de la quantité considérable de dix millions de tonnes de riz, lesquelles ne peuvent être vendues sur le marché mondial sous peine de provoquer un effondrement du prix et des pertes colossales pour le gouvernement. Ce schéma de soutien aux prix du riz – en somme un simple programme de subventions, peu différent des subventions, en France, à la production viticole – a coûté jusqu’à présent quelques 260 milliards de bahts (6,8 milliards d’euros) aux contribuables. Dans les conditions actuelles, le gouvernement peut espérer vendre à 470 euros la tonne du riz qu’il a acheté à 570 euros la tonne. Selon le Fonds monétaire international, le programme pourrait coûter à la Thaïlande 1 % de son PIB avant même la prise en compte des frais de stockage et de gestion.

Parmi les critiques, figurent sans surprise les membres du Parti démocrate d’opposition, mais aussi des économistes comme Ammar Siamwalla, un expert respecté des questions agricoles. Quand les Démocrates étaient à la tête du pays, entre décembre 2008 et juillet 2011, ils avaient aussi mis en place un système de garantie des prix du riz, mais celui-ci exigeait que les paysans se fassent rembourser la différence entre un prix garanti et le prix du marché – un système jugé trop compliqué par nombre de riziculteurs. Outre la non rentabilité du nouveau programme, ces critiques mettent en exergue ses nombreuses failles qui permettent notamment aux propriétaires de rizeries (usines de décortiquage du riz) et propriétaires d’entrepôts de s’enrichir sur le dos des paysans. Le Département des enquêtes spéciales (DSI) a lui-même révélé récemment les nombreuses techniques utilisées par ces industriels du riz pour bénéficier indûment du système. Pour autant, le gouvernement reste ferme dans sa volonté de poursuivre ce programme, qui semble lui assurer une large popularité au sein de la population rurale.