Indonésie : un superflic pour les Papous

Un ancien chef de la lutte anti-terroriste a été nommé à la tête de la police en Papouasie occidentale. Cette décision, si elle se confirme, n’annonce rien de bon.

Un ancien chef de la lutte anti-terroriste a été nommé à la tête de la police en Papouasie occidentale. Cette décision, si elle se confirme, n’annonce rien de bon.

Selon le blog TalkArchipelago, qui cite le quotidien indonésien Kompas, le général Tito Karnavian, âgé de 47 ans, ancien patron du Détachement 88, unité d’élite chargée de la lutte antiterroriste, a été nommé le 3 septembre à la tête de la police dans la moitié indonésienne de l’île de Papouasie. Karnavian a été critiqué pour la violence dont il a fait preuve lorsqu’il commandait le Détachement 88, une unité antiterroriste formée après l’attentat de 2002 à Bali avec l’aide de l’Australie et des Etats-Unis.

Rattachée à l’Indonésie à la suite d’un référendum honteux en 1969, divisée en deux provinces au mépris de l’« autonomie spéciale» dont elle est censée bénéficier, la Papouasie occidentale a connu, ces derniers mois, une augmentation des assassinats de civils et de membres des forces de l’ordre. Un fort sentiment irrédentiste y est entretenu par la brutalité de la répression militaire et policière. En revanche, l’OPM (Mouvement pour une Papouasie libre) y demeure une guérilla faible.

La colonisation de cette région interdite aux observateurs étrangers se poursuit depuis quatre décennies.  Ainsi que le relevait en juin l’hebdomadaire The Economist, «les motocyclettes y appartiennent aux migrants indonésiens – des Cèlebes, de Madura, de Java – qui représentent de 40% à 50% des 3,6 millions d’habitants des deux provinces. Les migrants sont les propriétaires des magasins, des restaurants, des immeubles, ainsi que les membres de la police et de l’armée. Assis dans la boue, les autochtones papous vendent à la criée légumes et fruits.» La nomination d’un superflic aux méthodes brutales, habitué de la traque des terroristes et non des problèmes sociaux ou économiques, ne préfigure aucun changement dans les méthodes de Jakarta. Quatorze ans après la chute de Suharto, la Papouasie indonésienne continue d’être gérée comme l’était le Timor oriental du temps du dictateur.