Indonésie : la dynastie Sukarno toujours en vie

Le dégel est bien avancé entre l’actuel président et les descendants du père de l’indépendance. La famille de Sukarno entend continuer de jouer un rôle politique.

Le dégel est bien avancé entre l’actuel président et les descendants du père de l’indépendance. La famille de Sukarno entend continuer de jouer un rôle politique.

Le Parti démocrate, fondé par l’actuel président Susilo Bambang Yudhoyono (SBY), appuie l’entrée au gouvernement de Puan Maharani, petite fille de Sukarno (1901-1970), premier président de l’Indonésie. Le parti estime qu’elle «dispose des qualités nécessaires» à l’exercice des fonctions de ministre, a déclaré le 28 décembre Nurhayati Ali Assegaf, président du groupe parlementaire des Démocrates à l’Assemblée. Il s’agit de remplacer le ministre de la Jeunesse et des Sports, Andi Mallarangeng, un favori de SBY qui a dû démissionner de ses fonctions pour faire face à des accusations de corruption.

Ainsi donc, la «dynastie Sukarno» se porte moins mal qu’on ne le pense. Comme ses deux frères ne s’intéressant pas à la politique, du moins pour l’instant, Puan est l’héritière de Megawati Sukarnoputri, fille aînée du père de l’indépendance et présidente de 2001 à 2004. Agée de 40 ans, elle n’est pas une novice : élue à la chambre basse (DPR), elle y préside depuis janvier 2012 le groupe parlementaire du PDI-P (Parti démocratique indonésien-lutte), la formation présidée par Megawati. Le père de Puan, Taufiq Kiemas, troisième mari de Megawati, a été élu (avec l’aide de SBY) président de l’Assemblée consultative du peuple (MPR), qui rassemble députés et représentants des régions.

Mais les ambitions de Puan se sont longtemps heurtées à la rancune de sa mère à l’égard de SBY, son ancien super-ministre de la sécurité. SBY, général à la retraite et qui a fait sa carrière sous Suharto, a fait l’affront de se présenter contre Megawati en 2004 lors de la première élection présidentielle au suffrage universel. Et il l’a écrasée au deuxième tour (60%). Ce scénario s’est reproduit en 2009, lorsque SBY a glané son deuxième et dernier mandat présidentiel.

Depuis des années, Taufiq a tenté d’amorcer une réconciliation mais Megawati n’a salué SBY qu’à deux reprises. Elle n’a pas refusé une invitation à un banquet présidentiel en 2011, lors de la visite de Barack Obama. En novembre 2012, elle s’est rendue une deuxième fois à la présidence pour participer à la cérémonie d’attribution à son père de la dignité de «héros national». Le 26 décembre, enfin, Taufiq a été remettre à SBY un exemplaire de sa biographie. Il s’est fait accompagner par sa fille et la rencontre a ouvert le débat sur une éventuelle participation au gouvernement de Puan.

Puan affiche des ambitions présidentielles. Elle ne s’en cache plus depuis octobre 2011 mais  subordonne ses propres choix aux décisions de Megawati. Si celle-ci décide de se représenter en 2014, donc à l’âge de 67 ans, Puan fera campagne pour elle. Quant à Megawati, elle hésite. D’un côté, elle a subi deux graves revers électoraux face à SBY et le PDI-P a perdu une sérieuse partie de son audience. D’une autre, le Parti démocrate risque de demeurer dans l’histoire le parti d’une présidence : sa direction est discréditée par des scandales de corruption et SBY n’a pas réussi à organiser sa succession.

Une multitude de scénarios peuvent donc se dérouler d’ici à 2014. Mais, même sur le recul, le PDI-P «sukarniste» demeure une formation dont il faut tenir compte.  Il a un atout : avec Puan Maharani,  la succession de Megawati semble assurée.