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Indonésie : une 34ème province à Kalimantan

Jakarta a décidé, le 27 octobre, la création d’une nouvelle  province située dans la partie indonésienne de l’île de Bornéo. Avantages et inconvénients.

Kalimantan, partie indonésienne de Bornéo, était divisée en trois provinces : Sud, Est, Ouest. La nouvelle province (Kalimantan Nord) bordera les deux Etats insulaires de la Malaisie, le Sabah et le Sarawak, et, pour l’essentiel, représentera une amputation de Kalimantan Est. Avec une population estimée à un peu plus d’un demi-million de gens (sur les 140 millions d’Indonésiens), elle sera l’une des moins peuplées de l’Indonésie. Mais son étendue sera vaste : elle comprendra les régences (districts) actuels de Bulunga, Nunukan, Malinau etTana Tidung, ainsi que la municipalité insulaire de Tarakan, dans la mer des Célèbes, dont l’aménagement est le plus avancé. Le chef-lieu de la province sera la ville de Tanjung Selor, au sud-ouest de Tarakan.

«Ces territoires sont riches en pétrole, gaz et minerais. Aussi, leur nouvelle administration peut se concentrer sur l’enrichissement des habitants», a déclaré au Jakarta Post Gamawan Fauzi, ministre indonésien de l’intérieur. « Kalimantan Nord constituera une porte ouverte vers la Malaisie, le sud des Philippines et Brunei. En conséquence, la province est une location stratégique pour contrer toute menace concernant l’unité de notre nation en provenance des pays voisins», a estimé un député, Agun Gunandjar Sudarsa.

Selon le Jakarta Globe, un chercheur de l’Institut des sciences (LIPI), Ikrar Nusabakti, a jugé que l’Indonésie «doit désormais coopérer plus étroitement avec la Malaisie pour développer nos zones frontalières». Mais le président de la branche locale de la Chambre du commerce et de l’industrie, Fauzi Bahar, s’est inquiété du mauvais état des infrastructures locales et a averti qu’il faudra beaucoup d’efforts pour mettre en place la nouvelle administration, ce qui devrait être l’affaire d’au moins un an.

Enfin, le site écologiste Mongabay s’inquiète du risque d’une dérive des plans gouvernementaux pour contrecarrer la déforestation en faveur de plantations industrielles. L’an dernier, une étude conjointe (London School of Ecomics, MIT-Harvard et Université de l’Etat du Dakota-Sud)  a mis en évidence une corrélation entre la multiplication des juridictions administratives indonésiennes et la croissance de la déforestation (période de 1998 à 2009). En outre, comme les politiciens s’en remettent aux planteurs, forestiers et mineurs pour financer leurs campagnes électorales, les autorisations de déboisement et d’implantation se multiplient après la tenue des scrutins.

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Le Vietnam premier buveur de bière en Asie du Sud-Est

Les Thaïlandais sont battus : les Vietnamiens sont les premiers consommateurs de bière au sein de l’Asean. Il est vrai que ces derniers sont plus nombreux.

2,6 milliards de litres de bière ont été consommés en 2011 au Vietnam, contre 1,8 milliard en Thaïlande, rapporte le site Tuoi Tre en citant une enquête d’Euromonitor International. Le Vietnam, toutefois, compte environ 86 millions d’habitants, contre 65 millions en Thaïlande. En outre, à Hanoï et dans le reste du nord, une bière peu fermentée et à faible taux d’alcool est fort prisée.

En Asie du Sud-Est, les Philippines (près de 100 millions d’habitants) talonnent la Thaïlande avec 1,6 milliard de litres absorbés. Les autres Etats membres de l’Asean sont plus raisonnables. Les deux Etats à majorité musulmane sont, en proportion de leur population, les moins grands buveurs  : Indonésie, 236 millions de litres (240 millions d’habitants) ; Malaisie, 171 millions de litres (27 millions d’habitants). Le Laos (6 millions d’habitants) se défend bien : 134 millions de litres ; il en est de même pour Singapour (5 millions d’habitants, 108 millions de litres), mais les visiteurs y sont très nombreux. Le Cambodge (14 millions d’habitants) consomme 136 millions de litres.

La Birmanie (Myanmar) est à la traîne, sur le plan régional, avec 30 millions de litres consommés en 2011. Mais cette donne pourrait rapidement changer avec l’ouverture du pays et sa probable forte expansion économique. Quant au petit sultanat de Bruneï, il se situe hors radar : la consommation d’alcool y est interdite et la quantité de bière qui y circule quand même pour être consommée dans des tasses à thé est probablement très faible.

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Asie du Sud-Est : l’anglais, langue de plus en plus officielle

Brunei finance un programme de formation en anglais. L’objectif : faire de la langue de Shakespeare la lingua franca de la région. Pauvre Molière…

L’anglais est la langue de travail de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est. Quand les Etats de la francophonie ont rejoint l’Asean – le Vietnam en 1995, le Laos en 1997 et le Cambodge en 1999 –, ils ont dû donner des cours d’anglais intensifs à leurs fonctionnaires, diplomates ou financiers impliqués dans les activités de l’Association. Le petit mais très riche sultanat de Brunei, ancien territoire britannique niché sur la côte septentrionale de Bornéo, entend accélérer le mouvement.

Selon le Guardian, le sultanat finance à hauteur de 25 millions de dollars un programme de formation de formateurs dont l’application est confiée conjointement à l’Université de Brunei Darussalam (UBD) et à l’East-West Centre américain basé à Honolulu. «Quelque 70 formateurs et officiels participeront au programme», rapporte le quotidien londonien. Des cours intensifs seront fournis pendant sept semaines sur le campus de l’UBD. Ils seront suivis d’un cycle de quatre semaines à Hawaii consacré «à la culture et au leadership», a déclaré au Guardian Terance Bigalke, directeur de l’enseignement à l’East-West Centre. Le projet s’étalera sur cinq ans et comportera donc au moins une vingtaine de sessions de onze semaines.

Des efforts importants ont été entrepris par plusieurs Etats de l’Asean sans tradition anglophone, notamment la Thaïlande, où un projet ambitieux implique quatorze millions d’élèves et d’étudiants. «Le statut dominant de l’anglais au sein de l’Asean n’est pas contesté», a expliqué au Guardian Salbrina Sharbawi, qui dirige le projet associant l’UBD à Hawaii. La participation américaine est, bien entendu, intéressante dans le contexte actuel, le chinois étant le principal concurrent de l’anglais, au moins dans le milieu des affaires.

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Noces royales au sultanat de Brunei

Depuis une semaine, le micro mais richissime Etat vit au rythme des cérémonies et festivités qui se concluront par le mariage, le 23 septembre, d’une des filles du sultan.

La princesse Hajah Hafizah Sururul Bolkiah, 32 ans, convolera avec Pengiran Haji Mohamed Ruzaini, de trois ans son cadet. Une myriade de têtes couronnées et de dirigeants politiques devrait participer au banquet donné, le 23 septembre au soir, par le sultan Hassanal Bolkiah dans son palais de 1.700 pièces. La liste des invités ne sera rendue publique que ce jour-là. En 2004, lors du mariage d’un des fils du sultan, quelque 2.000 personnes, dont des membres des familles royales du Japon, de Jordanie, de Grande-Bretagne et de Malaisie, avaient fait le déplacement. Dans le petit sultanat, réputé pour sa richesse mais très peu pour sa vie festive, les cérémonies avaient attiré une large foule dans la capitale, Bandar Seri Begawan. Une «excitation» similaire y règne à nouveau aujourd’hui. Chaque jour, comme en témoigne un site internet spécialement créé pour l’occasion, se tiennent des cérémonies traditionnelles ou des manifestations culturelles.

La princesse est une des sept filles du sultan qui, de ses trois mariages, a également eu cinq fils. La famille Bolkiah règne sur Brunei depuis le XIVe siècle. En dépit de quelques tentatives de démocratisation, le sultan Hassanal, 66 ans, conserve le contrôle d’une monarchie absolue dont il a hérité en 1967. Avec, selon les estimations du FMI, un PIB de plus de 21 milliards de dollars en 2012, dont la moitié générée par les réserves de pétrole et de gaz naturel, le sultan en fait profiter ses 400.000 sujets. Tous ont ainsi un accès gratuit aux soins et à l’éducation. Mais, selon l’Independent, le sultan a aussi ses petits caprices, à l’image de sa collection de voitures, comprenant entre autres 500 Rolls-Royce, estimée à plus de 5 milliards de dollars.

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Mer de Chine du Sud : les multiples noms d’un contentieux

Les eaux entre le sud chinois et Singapour sont appelées mer de Chine du Sud pour des raisons de simplification. Car les noms abondent.

Aux yeux du Vietnam, il s’agit de la mer de l’Est. Les Chinois l’appellent la mer de Chine méridionale. Le président Noynoy Aquino a officiellement compliqué le tableau en décrétant, le 13 septembre, que la partie occidentale de ces eaux s’appelait désormais la mer des Philippines occidentales là où elles couvrent la zone économique exclusive que peut revendiquer Manille aux termes de législation internationale.

Les rapports et informations sur les contentieux, les disputes et les accrochages dans ces eaux sont simplifiés : les médias et les diplomates utilisent le terme mer de Chine du Sud ; les deux principaux archipels sont appelés par leurs noms anglophones : les Paracels (au nord) et les Spratleys (au sud). Toutefois, les Paracels sont appelés Hoang Sa par les Vietnamiens et Xisha par les Chinois; les Spratleys, Truong Sa (Vietnam) et Nansha (Chine).

La Chine revendique environ 80% de ces eaux, selon une délimitation approximative mais qui couvre les deux archipels ainsi qu’une partie à la fois du plateau continental vietnamien et de la zone économique exclusive des Philippines, au large de Palawan et de Luçon. En juin dernier, Pékin a créé un «territoire municipal» (la ville de Sansha ou ‘Trois sables’) qui inclut les deux archipels ainsi que de petits récifs, ceux de Macclesfied Bank. Pour simplifier les choses, la mairie de Nansha est située sur une île des Paracels connue sous le nom de Woody.

Les Vietnamiens sont exaspérés car ils considèrent que les Paracels et les Spratleys sont sous leur souveraineté. Les Chinois se sont installés aux Paracels en en chassant, en janvier 1974, la faible garnison sud-vietnamienne qui s’y trouvait encore. Tous les pays riverains sont présents aux  Spratleys, y compris Taïwan et la Malaisie (donc à la seule exception du petit sultanat de Brunei, sur l’île de Bornéo). Lors de la débâcle d’avril 1975, ayant reçu l’ordre de se replier sur un secteur maritime contrôlé par la flotte américaine, la marine sud-vietnamienne en avait averti son adversaire nord-vietnamien. La raison : que le Nord occupe les positions du Sud aux Spratleys avant les Chinois.

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Hillary Clinton à Pékin : une réception peu chaleureuse

La mer de Chine du Sud ne sera pas le théâtre d’une guerre entre la Chine et les Etats-Unis mais Pékin redit à Washington de cesser de se mêler de ce contentieux.

A Jakarta, puis à Pékin où elle a séjourné les 4 et 5 septembre, la secrétaire d’Etat américaine a réitéré que l’intérêt général est le lancement par «la Chine et l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est d’un processus diplomatique vers le but partagé d’un Code de conduite», ainsi qu’elle l’a répété à Pékin après y avoir été reçue le 5 septembre par le président Hu Jintao.

En Indonésie, avant de s’envoler pour Pékin, Mme Clinton a redemandé aux Etats membres de l’Asean d’adopter une position commune sur la mer de Chine du Sud, ce qu’ils n’avaient pas réussi à faire lors de la conférence annuelle de leurs ministres des affaires étrangères à Phnom Penh en juillet. C’est surtout cet appel qui a irrité la Chine, qui revendique 80% des eaux de la mer de Chine du Sud et veut négocier individuellement ses contentieux avec les quatre Etats de l’Asean qui sont riverains, à savoir le Vietnam, les Philippines, la Malaisie et Bruneï.

Pour souligner leur mauvaise humeur, les Chinois ont supprimé à la dernière minute une audience que devait accorder à Mme Clinton le vice-président chinois Xi Jinping, successeur présumé de Hu Jintao. L’agence officielle Xinhua a demandé aux Etats-Unis de cesser de jouer «à la dérobée, les fauteurs de trouble»  et le Global Times, organe également officiel, a reproché à Mme Clinton de manifester de «l’antipahtie» à l’égard de la Chine. Hu Jintao a néanmoins rectifié le tir en saluant les «efforts» de la secrétaire d’Etat américain «pour faire progresser la relation sino-américaine.»

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Asie du Sud-Est : Hillary Clinton seule à la barre

La secrétaire d’Etat américaine reprend le chemin de l’Asie de l’Est où les disputes territoriales ne perdent rien de leur acuité. Une dernière grande tournée ?

Hillary Clinton s’est envolée le 30 août pour les îles Cook, où elle participe à un forum avant de gagner l’Indonésie, la Chine, Timor Leste, le sultanat de Brunei. Sa dernière étape sera Vladivostok, en Russie, afin d’y participer, sur l’île Rousski, au sommet annuel de l’Apec les 8 et 9 septembre. Elle y représentera le président Barack Obama, retenu par sa campagne électorale pour un deuxième mandat.

L’étape la plus importante de cette tournée sera vraisemblablement une visite à Pékin, les 4 et 5 septembre, dont le programme n’a pas encore été fixé. Mme Clinton compte aborder avec les dirigeants chinois, selon sa porte-parole Victoria Nuland, «un large éventail de sujets importants pour les relations sino-américaines» avant le renouvellement de la direction chinoise prévu à l’automne. «Nous continuons de réclamer, a-t-elle ajouté, des échanges multilatéraux à propos d’un Code de conduite en mer de Chine du Sud qui observe la loi internationale et le traité sur la Loi de la mer». Les eaux de la mer de Chine méridionale font l’objet de revendications non seulement de Pékin et de Taïwan mais aussi de quatre Etats de l’Asean (Vietnam, Philippines, Malaisie et Brunei).

Inaugurés par Bill Clinton en 1991, les sommets des 21 Etats ou entités de l’Apec (Asia-Pacific Economic Cooperation)  sont devenus les grands-messes annuelles d’une région qui regroupe 40% de l’humanité et représente 44% du commerce international. Elles ne sont pas l’occasion d’accords globaux mais d’échanges, notamment bilatéraux, qui ont une importance évidente. Mme Clinton ne rendra pas visite à deux alliés des Etats-Unis, le Japon et la Corée du Sud, séparés par un contentieux territorial.

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Le taisez-vous des Chinois aux Américains

Le ministre chinois des affaires étrangères est en Asie du sud-est jusqu’au 13 août. Au menu : la défense des intérêts de Pékin en mer de Chine du Sud.

Evitant soigneusement le Vietnam et les Philippines, qui contestent le plus vigoureusement la souveraineté chinoise sur les eaux de la mer de Chine du Sud, Yang Jiechi s’est d’abord rendu à Jakarta, où il a été reçu le 10 août par le président Susilo Bambang Yudhoyono, avant de gagner le petit sultanat de Brunei et la Malaisie. L’objectif de cette tournée éclair, qui prend fin le 13 août : solliciter la compréhension de trois membres de l’Asean, surtout celle de l’influente Indonésie, afin de calmer un peu le jeu et de s’assurer que l’Association des nations de l’Asie du sud-est ne se ressoude pas dans une attitude antichinoise.

L’Indonésie joue les médiateurs depuis que neuf Etats membres de l’Asean ont été incapables d’imposer au dixième, le Cambodge, qui assure la présidence annuelle de l’Association et qui est un allié de Pékin, une position commune à l’issue de leur conférence ministérielle de juillet à Phnom Penh. Fin juillet, une médiation de Marty Natalegawa, ministre indonésien des affaires étrangères, a permis la publication d’une déclaration sur le Code de conduite en mer de Chine du Sud, adopté en 2002 en accord avec Pékin mais qui n’a jamais été appliqué, la Chine expliquant qu’il le serait «au moment opportun».

Entre-temps, l’annonce par Pékin de la création d’une garnison chinoise basée dans l’archipel des Paracels a provoqué une réaction de Washington, un porte-parole du Département d’Etat américain estimant, le 3 août, que cette initiative chinoise et la création, au préalable, de la «ville» chinoise de Shansha couvrant les archipels du secteur contribuait à renforcer les tensions en mer de Chine du Sud. La Chine a rétorqué que les Etats-Unis n’avaient pas le droit de se mêler de cette affaire. Le Quotidien du peuple, organe du PC chinois, a même déclaré que la Chine était en droit de demander de « crier aux Etats-Unis ‘taisez-vous’». La mission confiée à Yang Jiechi est donc de s’assurer que le courant continue de passer entre Pékin et certaines capitales de l’Asean tout en réitérant que la souveraineté chinoise sur les eaux concernées demeure «indiscutable».