Catégories
Malaisie Politique

Malaisie : l’affaire Altantuya revient hanter Najib

Le Premier ministre de Malaisie nie que sa femme ait interféré dans l’enquête sur la mort de la Mongole.

En novembre 2012, l’homme d’affaire Deepak Jaikishan, autrefois proche de l’épouse du Premier ministre de Malaisie Najib Tun Razak, Rosmah Mansor, avait déclaré que cette dernière était intervenue pour forcer un détective privé à réfuter une déclaration assermentée. Ce détective, P. Balasubramaniam, avait fait en juillet 2008 une déclaration sous serment révélant les liens intimes entre le Premier ministre Najib Tun Razak et Altantuya Shaariibuu, une interprète mongole âgée de 28 ans. Altantuya avait été assassinée en octobre 2006 après avoir réclamé sa « part » dans le cadre de la vente controversée de sous-marins français à la Malaisie.

La déclaration de Balasubraniam contenait des éléments extrêmement dommageables pour Najib, alors vice-Premier ministre et ministre de la Défense, affirmant non seulement qu’il entretenait une liaison avec Altantuya, mais aussi que son aide de camp personnel était intervenu pour « régler le sort » de la jeune femme. Le lendemain de cette déclaration, le détective avait fait une seconde déclaration assermentée réfutant la première, établie, affirmait-il, « sous la contrainte », puis avait disparu. L’homme d’affaires Deepak affirme, sans toutefois fournir de preuve, que Rosmah lui avait demandé d’intervenir auprès du détective pour qu’il revienne sur sa première déclaration.

Le 17 janvier, selon le quotidien singapourien The Straits Times, le Premier ministre Najib a pour la première fois réagi aux propos de Deepak en estimant que celui-ci « n’était pas crédible ». Le fait que Najib ait attendu deux mois pour réagir et qu’il n’intente pas d’action en justice pour contrer les propos de l’homme d’affaires ont toutefois fait enfler la polémique. Les élections générales en Malaisie sont prévues au printemps 2013 et les attaques de part et d’autres se multiplient au fur et à mesure que la date du scrutin approche.

Catégories
Culture Malaisie Politique

L’affaire Altantuya croquée dans une BD en Malaisie

Zunar, dessinateur de BD, publie un album satirique sur la vente des Scorpènes et l’affaire Altantuya en Malaisie.

Zunar est venu faire imprimer son album « Pak Monggol & Scorpene » (Mr Mongol et Scorpène) à Bangkok, car, dit-il, « aucune firme n’osera l’imprimer en Malaisie ». Sur 32 pages en couleurs, ce quinquagénaire qui se définit comme dessinateur de BD politiques, raconte à sa manière l’odyssée de la vente des sous-marins français de type Scorpène en 2002 au gouvernement malaisien et la mort tragique d’une interprète mongole Altantuya Shaariibuu, amante du principal intermédiaire dans la transaction, assassinée en octobre 2006. Cette affaire secoue depuis la scène politique malaisienne et a mis en cause l’actuel premier ministre Najib Razak, que d’aucuns reconnaîtront sous les traits du personnage de l’album Pak Monggol, dont les initiales sont justement P.M. Deux policiers des Services spéciaux ont été condamnés à mort en 2009 pour le meurtre, mais leur commanditaire demeure jusqu’à présent mystérieux.

Zunar a publié cet album en collaboration avec l’ONG Suaram, laquelle a engagé en novembre 2009 un cabinet d’avocats français pour enquêter sur d’éventuels pots-de-vin versés par la Direction des constructions navales (le fabricant des sous-marins) à des membres du gouvernement malaisien. « Nous avons voulu faire quelque chose de très simple pour expliquer cette affaire aux Malaisiens, particulièrement à ceux qui vivent dans des villages, n’ont pas accès à l’internet et ne connaissent pas cette histoire », explique-t-il dans un entretien avec Asie-Info. Conscient des risques de représailles par le gouvernement à son encontre, il dit qu’il estime qu’il « est de sa responsabilité en tant que Malaisien et en tant que dessinateur d’expliquer la vérité ». Zunar a déjà été emprisonné dans le passé pour ses dessins satiriques. Son album, actuellement en langue malaise mais qui sortira prochainement en anglais, peut être acheté sur le site de l’auteur : http://zunarcartoonist.com.

Catégories
Malaisie Politique

L’Allemagne accusée d’ingérence en Malaisie

Le scandale de la vente des sous-marins français en Malaisie s’épaissit et touche, par ricochet, l’Allemagne.

Le gouvernement de Malaisie a convoqué l’ambassadeur d’Allemagne à Kuala Lumpur après avoir appris que celle-ci avait financé en 2010 un projet de l’organisation malaisienne de protection des droits de l’Homme, Suaram. Selon un communiqué du ministère malaisien des Affaires étrangères, « l’action de l’ambassade d’Allemagne (…) peut être considérée comme une ingérence dans les affaires intérieures d’un Etat souverain ». Cette étrange intervention du gouvernement malaisien s’éclaire si l’on rappelle que Suaram a déposé l’an dernier une plainte devant la justice française pour corruption contre le premier ministre Najib Razak dans l’affaire de l’achat de deux sous-marins français Scorpène en 2002. Lors de cette affaire d’une grande complexité, 114 millions d’euros ont été versés par la Direction des Chantiers Navals (DCN) à des sociétés intermédiaires dirigées par Abdul Razak Baginda, un conseiller proche de Najib, lequel était à l’époque ministre de la Défense.

Ajoutant une touche de roman noir à cette saga, l’amante d’Abdul Razak Baginda, l’interprète mongole Altantuya Shaariibuu, avait été horriblement assassinée par deux policiers employés par les services du ministère de la Défense en 2006 après qu’elle eut réclamé sa part de la commission. Depuis le dépôt de la plainte, les comptes de Suaram sont passés au crible par plusieurs agences gouvernementales, lesquelles l’ont même accusée de blanchiment d’argent. La publication par le site Asia Sentinel de nombreux documents saisis par la justice française semble avoir poussé le gouvernement malaisien à lancer cette campagne à l’encontre de Suaram.

Catégories
Asie Malaisie Politique

France-Malaisie : les sous-marins refont surface

Ouverte en mars dernier en France sur l’éventuel versement de pots-de-vin lors de la vente de sous-marins français à la Malaisie en 2002, l’instruction progresse.

Lors d’une conférence de presse à Bangkok, Joseph Breham, l’un des deux avocats de Suaram, ONG malaisienne qui a porté plainte contre le gouvernement de Malaisie dans le cadre de cette affaire, a indiqué que l’actuel premier ministre Najib Razak et son ex-conseiller Abdul Razak Baginda figuraient tous deux sur la liste des sept témoins-clés que les juges d’instruction français souhaitent entendre. Anticipant une éventuelle convocation, le gouvernement malaisien a d’ores et déjà fait savoir qu’il ne coopérerait pas à l’enquête. «Si la police malaisienne n’oblige pas (ces deux témoins) à venir en France, on peut très bien imaginer qu’Interpol délivre un mandat d’arrêt international», a affirmé l’avocat. Interrogé récemment sur le fait de savoir s’il craignait de se rendre en France de peur d’être arrêté, le premier ministre Najib Razak a rétorqué par un «No comment» furieux.

Parallèlement, les avocats de Suaram, qui ont accès à 153 documents d’enquête saisis par la police judiciaire lors d’un raid dans les locaux de la Direction de la construction navale (DCN), laquelle a construit les sous-marins, considèrent que deux d’entre eux sont particulièrement suspicieux. Le premier est un rapport confidentiel qui explique que des versements substantiels d’argent devront être faits à des individus ou des organisations politiques et que l’Umno (le parti cœur de la coalition gouvernementale en Malaisie) serait le principal bénéficiaire. Le second est une facture de 359.450 euros émise par la firme Terasasi (une firme intermédiaire malaisienne) à l’intention de la partie française. Sur cette facture figure une note écrite à la main : «Razak demande si cette commission de soutien peut être prise en compte assez rapidement». Selon l’usage malaisien, on appelle quelqu’un par son nom de famille. «Razak» semble donc désigner le Premier ministre «Najib Razak», mais pourrait éventuellement désigner Abdul Razak Baginda. Joseph Breham a indiqué que l’instruction et le procès pourrait s’étaler sur une période  «d’un à vingt ans».

Illustration par Zunar ([email protected])