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Malaisie Politique

Appel à brûler des bibles en Malaisie

Un groupuscule pro-malais veut organiser un autodafé de bibles.

Le tract a été placé dans la boîte aux lettres d’une église de Penang, un Etat du nord de la fédération de Malaisie, avec pour titre : « Brûlons ! Autodafé de bibles en langue malaise ». Ce « festival », organisé par un mystérieux groupe nommé le Groupe d’action contre les bibles en malais, doit se tenir le 27 janvier dans un lieu du nord de la Malaisie dont le nom n’a pas été révélé par la presse. Combien de tracts similaires ont été distribués ?

Quelle est l’influence de ce groupuscule ? Impossible de répondre. Mais, selon le quotidien de Singapour The Straits Times, cette campagne contre les bibles en malais n’est pas un épiphénomène. Une décision de la Haute cour de justice avait autorisé en décembre 2009 un journal chrétien en malais à utiliser le mot « Allah » pour désigner le Dieu chrétien.

Ce jugement avait immédiatement provoqué la fureur de certains groupes malais musulmans et une église dans la banlieue de Kuala Lumpur avait été incendiée. 60 % des 29 millions de Malaisiens sont d’ethnie malaise et de religion musulmane.

Les chrétiens, dont une grande majorité sont d’origine chinoise, constituent 9 % de la population

Le gouvernement de Penang a demandé à la police de mener une enquête sur cet autodafé annoncé. Le chef de l’opposition en Malaisie, Anwar Ibrahim, a aussi condamné l’appel à brûler des bibles lors d’une conférence de presse, déclarant, selon le Straits Times, qu’il s’agissait d’un « acte extrême qui doit être rejeté par tous les Malaisiens, y compris les musulmans ».

Le tract a d’autant plus inquiété certaines parties de la population que sa distribution intervient peu après qu’un parlementaire, leader d’un groupe extrémiste pro-malais nommé Perkasa, a appelé à l’organisation d’un autodafé massif des bibles en malais utilisant le mot « Allah ». Lim Chee Wee, président du Barreau de Malaisie, a estimé que cet incident montrait que « Perkasa se sentait libre d’agir en toute impunité » et qu’il fallait entamer des poursuites judiciaires contre cette organisation.

Perkasa est proche du parti malais UMNO, élément central de la coalition Front national (BN) au pouvoir. Des sondages, à l’approche des élections générales du printemps prochain qui s’annoncent particulièrement serrées, ont montré que l’UMNO avait perdu une grande partie du soutien des Malaisiens d’origine chinoise, lesquels constituent 25 % de la population, et devra s’appuyer sur l’électorat malais pour conserver sa majorité.

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ASEAN Birmanie Politique

La Birmanie refuse une table ronde sur les Rohingyas

Le gouvernement birman a rejeté l’offre de l’Asean d’organiser des pourparlers tripartites dans l’objectif d’apaiser les violences entre Rakhines et Rohingyas.

A la demande du secrétaire général de l’Asean, Surin Pitsuwan, le ministre cambodgien des Affaires étrangères Hor Namhong (le Cambodge assure la présidence annuelle de  l’Asean), a écrit à ses homologues des pays membres pour proposer « une rencontre sur la question des Rohingyas ». Mais, a indiqué Surin Pitsuwan, lors d’une conférence de presse le 30 octobre en Malaisie, cette demande s’est heurtée à une fin de non-recevoir de la part des autorités de Birmanie (Myanmar), lesquelles considèrent que le problème posé par les Rohingyas musulmans est « une question interne ». Selon l’agence de presse malaisienne Bernama, Surin a toutefois mis en garde Naypyidaw (capitale de la Birmanie), en lançant : « Le Myanmar estime qu’il s’agit d’une affaire interne, mais votre affaire interne peut devenir la nôtre un jour prochain si vous ne faites pas attention ».

Le secrétaire général de l’Association souhaitait l’organisation de pourparlers entre les pays membres de l’Asean (dont la Birmanie), les Nations unies et les autorités birmanes pour apaiser les affrontements entre Rohingyas musulmans et Rakhines bouddhistes, qui ont fait plus de 150 morts depuis juin dernier dans l’Etat Rakhine, dans le nord-ouest de la Birmanie, près de la frontière du Bangladesh. Surin a estimé que sa démarche n’avait pas été un échec complet car certains Etats-membres de l’Asean avaient indiqué leur accord avec sa proposition.

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Birmanie Politique

Résurgence des violences dans l’Etat Rakhine de Birmanie

Depuis la reprise des affrontements le 21 octobre entre Rakhines bouddhistes et Rohingyas musulmans dans l’ouest, au moins 56 personnes ont été tuées.

Après les affrontements meurtriers de juin dans cet Etat de l’ouest de la Birmanie, les deux communautés avaient été séparées : les Rohingyas musulmans parqués dans des camps et les Rakhines bouddhistes libres de circuler. Depuis lors, aucune confrontation majeure n’avait été signalée, mais les conditions de vie très difficiles dans les camps, l’inquiétude de la communauté internationale, notamment de certains pays musulmans et de l’Organisation de coopération islamique, et la montée de la ferveur nationaliste parmi les bouddhistes birmans avaient fortement accru les tensions. Que s’est-il passé les 21 et 22 octobre pour qu’une nouvelle explosion de violences intervienne, notamment dans les districts de Mrauk-Oo, l’ancienne capitale royale de l’Arakan (nom passé de l’Etat Rakhine) et de Kyauktaw ? Nul ne l’a encore expliqué et la plus grande confusion règne sur la situation exacte dans l’Etat. Le couvre-feu, déjà en place dans certaines zones, a été étendu à celles où ont éclaté les nouveaux troubles.

Selon les autorités locales et certains journalistes sur place, Rohingyas et Rakhines figurent parmi les victimes, des échanges de coups de feu ont eu lieu et près de 2.000 maisons ont été brûlées. Dans une telle atmosphère de haine intercommunautaire, le moindre incident peut mettre le feu aux poudres. Or les Rohingyas préfèrent parfois prendre le risque de sortir des camps que d’y vivre affamé ou malade. Du point de vue de l’Etat birman, tous les Rohingyas sont des immigrants illégaux venus du Bangladesh voisin. Selon des historiens, une majorité d’entre eux vivent pourtant sur le sol birman depuis plusieurs générations, mais ils sont physiquement différents des Birmans et parlent un dialecte bengali.

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Politique Thaïlande

La Thaïlande promeut le dialecte malais du Sud

Bangkok va soutenir des médias audio-visuels en langue malaise de Pattani et poursuivre un programme scolaire pilote axé sur la promotion du dialecte.

L’Etat thaïlandais a toujours eu une politique, au mieux timide, au pire hostile, vis-à-vis de la langue malaise en cours à Pattani et de son écriture, le jawi, basée sur l’alphabet arabe avec quelques lettres des alphabets persan et urdu. Ce dialecte malais est parlé par les Malais musulmans qui constituent 90 % de la population des trois provinces méridionales de Pattani, Yala et Narathiwat. En 2006, la proposition de la Commission nationale de réconciliation, mise en place par le Premier ministre de l’époque Thaksin Shinawatra en 2004 pour trouver une solution pacifique au conflit du sud à majorité musulmane, avait suggéré de faire du malais de Pattani une «seconde langue de travail» à côté du thaï. Mais même cette suggestion de portée limitée avait été rejetée immédiatement par le président du Conseil privé du roi, Prem Tinsulanonda.

Aussi, les quelques pas faits par l’Institut Royal de Thaïlande, le très officiel établissement qui fixe les canons de la langue thaïe, pour promouvoir le malais de Pattani sont significatifs. Confirmant cette orientation, Niwattumrong Boonsongpaisan, un ministre auprès du Premier ministre, a indiqué le 16 octobre, selon le quotidien singapourien The Straits Times, que des programmes d’information sur des radios et des télévisions en langue malaise seraient renforcés avec le soutien du gouvernement. Jusqu’à présent, il existe quelques programmes en malais, gérés par des journalistes et des intellectuels du Sud, sur des radios locales avec un soutien très limité du gouvernement.

Parallèlement, un programme pilote consistant à enseigner le malais de Pattani en utilisant l’alphabet thaï, mis en place dans 15 écoles du Sud par l’université de Mahidol, va être étendu à plusieurs dizaines d’écoles. Toujours selon The Straits Times, une évaluation de ce programme a montré que, dans le Sud, les écoliers de ces établissements affichaient des  performances scolaires nettement supérieures à ceux étudiant dans des écoles où seul le thaï est enseigné. Très peu de Malais musulmans de la jeune génération savent lire et écrire le jawi, utilisé principalement dans le cadre de l’instruction religieuse.

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Analyse Indonésie Politique

En Indonésie, Aburizal Bakrie et le poids de la continuité

La nomenclature d’ancien régime est encore influente en Indonésie. La candidature à la présidence d’un homme d’affaires controversé en offre la preuve.

Le Golkar a servi, en Indonésie, de relais politique à la dictature de Suharto, lui délivrant, tous les cinq ans, le fort contingent de députés pour peupler sa chambre d’enregistrement. Quatorze ans après le limogeage de l’autocrate, le Golkar se porte plutôt bien et vient de repasser en tête des sondages (15,5%) devant le Parti démocratique du président Susilo Bambang Yudhoyono (SBY), une formation dont la direction est secouée par des scandales de corruption et qui, avec 13,7%, est loin du score réalisé lors des législatives de 2009 (21% des suffrages exprimés).

Parti de pouvoir, bien implanté – et pour cause – dans l’administration, le Golkar va donc tenter de reprendre la présidence, que SBY devra quitter en 2014 à la fin de son deuxième mandat. Le Golkar a nommé le 30 juin un candidat : Aburizal Bakrie, qui a fait fortune sous Suharto, s’est lancé un peu tardivement dans la politique et s’est assuré le contrôle de la machine électorale la plus résistante. Bakrie, 65 ans, partenaire influent de SBY, a été super-ministre pendant quelques années et passe pour l’un des principaux financiers de la coalition gouvernementale.

Il n’a pas, tant s’en faut, que des atouts. Lapindo, la compagnie à l’origine d’un flot de boue aussi désastreux que spectaculaire à Java, lui appartenait. Il est dénué de charisme et n’est guère populaire dans un pays où les médias sont probablement les plus libres de l’Asie du sud-est. Enfin, il n’est pas javanais (les deux tiers de la population) alors que, depuis 1945, tous les chefs d’Etat indonésiens l’ont été à l’exception de B. J. Habibie (qui n’a duré que seize mois après avoir été nommé successeur de Suharto). Bakrie est un Sumatranais d’ethnie malaise et il va lui falloir dénicher un candidat à la vice-présidence à la fois javanais, populaire et influent, profil qui ne court pas les rues.

Mais Bakrie est confiant. Il est parvenu, au sein de la coalition gouvernementale, à contrer avec succès les partisans des réformes, notamment de la lutte contre la corruption, le thème fructueux des deux campagnes présidentielles de SBY en 2005 et 2009. Ses moyens financiers lui ont également permis de s’assurer que personne, au sein du Golkar qu’il préside, ne pourrait faire obstacle à sa candidature. Une fois nommé, il a défini sa politique comme celle des «quatre points du succès» : les trois premiers sont la «trilogie du développement» de Suharto (forte croissance économique, développement équitable, stabilité) et le quatrième, un rajout de sa part, est le nationalisme…

S’étant placé sur la ligne de départ avec deux ans d’avance, Bakrie compte bien en écarter toute concurrence sérieuse. La tâche est dure mais pas impossible. Elu à deux reprises avec 60% des suffrages, SBY n’a rien fait pour sa succession : il s’est révélé indécis, incapable de nourrir des vocations. Son Parti démocratique, au lieu de se structurer, est en voie de désintégration et risque de ne pas survivre longtemps à une présidence qui n’a pas su ou voulu ancrer les réformes. Le point fort de SBY a été l’économie mais la forte expansion – en moyenne 6% par an – est surtout le résultat de l’exploitation des grandes richesses naturelles de l’archipel. Si jamais il est élu, Bakrie n’aura qu’à s’inscrire dans ce mouvement.

SBY, un général à la retraite qui s’est révélé assez charismatique et bon manœuvrier, est devenu la coqueluche des Occidentaux. Il est l’homme, disent Américains et Australiens, qui a prouvé que démocratie et islam peuvent cohabiter ; il a ancré la démocratie dans un pays qui compte une vaste majorité de musulmans modérés. La réalité est un peu différente : SBY a laissé la société indonésienne s’offrir un bol d’oxygène, avec des médias beaucoup plus libres. Mais cet officier d’ancien régime n’a pas touché au fonctionnement de la bureaucratie indonésienne. Et c’est peut-être ce qui explique pourquoi un profil comme celui d’Aburizal Bakrie – aux affaires douteuses, aux compétences limitées mais aux poches pleines – peut envisager sérieusement de briguer la tête de l’Etat.

Jean-Claude Pomonti

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Indonésie Société

Plus d’identité religieuse obligatoire pour les Indonésiens

Les Indonésiens n’auront plus à remplir la case «croyance» sur les nouvelles cartes électroniques d’identité. Un pas dans le bon sens.

La Constitution de l’Indonésie reconnaît l’existence d’un Dieu unique et de six religions : l’islam, le catholicisme, le protestantisme, l’hindouisme, le bouddhisme et le confucianisme. L’inscription de l’une de ces religions était obligatoire sur la carte d’identité, indispensable dans toutes les démarches administratives, y compris le mariage. Pour ceux qui ne se réclament pas de l’une de ces six religions, la mention «croyance » sera facultative sur les nouvelles cartes électroniques, a annoncé, sans tapage, le ministère de l’Intérieur le 1er mai, selon le Jakarta Post.

Plus de quatre cent mille individus seraient concernés par cette disposition selon les statistiques de l’ONG Conférence indonésienne sur la religion et la paix. Cette ONG a dénombré, en 2005, environ 245 croyances. Jusqu’en 2006, quand les députés ont voté une nouvelle loi sur les registres civils, ceux qui refusaient de se réclamer des six religions officielles ne pouvaient pas figurer sur les registres. Ils ne pouvaient donc pas officiellement se marier et leurs enfants étaient déclarés illégitimes.

Ces mesures dataient de la vague de répression anticommuniste qui a fait un demi-million de morts lorsque Suharto s’est installé au pouvoir en 1966. Ne pas déclarer une religion était alors devenu synonyme de communisme, lequel est interdit depuis cette date.

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Birmanie Indonésie Société

Lady Gaga et le Gay Pride : l’Indonésie fléchit, la Birmanie s’épanouit

Le concert de la star trash à Jakarta est menacé d’annulation, alors que les dirigeants birmans autorisent le premier festival Gay

Les idées simples conviennent mal pour traduire les réalités de l’Orient compliqué. Là où la massue de l’autoritarisme est la plus attendue, on reçoit avec étonnement un bouquet de fleurs. Là où la porte semblait ouverte, on se la prend soudainement dans la figure. Ainsi, la Birmanie, dirigée pendant près de cinquante ans par une implacable dictature militaire, a organisé le 17 mai sa première Gay Pride, témoignage de ce que l’ouverture politique que vit ce pays depuis le début de 2011 s’accompagne d’un appréciable assouplissement social. En revanche, l’Indonésie, donnée en exemple pour la modération de son islam et ses progrès démocratiques depuis la chute de Suharto en 1998, a interdit un concert de la pop star américaine Lady Gaga en tournée en Asie.

La Gay Pride de Birmanie s’est limitée à la représentation de pièces de théâtre, à des débats d’écrivains et à la diffusion de documentaires dans quatre villes du pays, dont Rangoon et Mandalay. Elle s’est déroulée dans le cadre de la Journée internationale contre l’homophobie et la discrimination envers les transsexuels. Le célèbre défilé qui ponctue la manifestation dans les autres pays n’a guère eu lieu, mais dans ce pays conservateur où les lois coloniales toujours en place punissent l’homosexualité, ce premier pas est significatif. En Indonésie, la police n’a, en revanche, pas autorisé l’organisation du concert de Lady Gaga, cédant aux pressions de petits groupes islamistes, comme le Front de défense de l’islam (FPI), lequel menaçait d’empêcher la chanteuse de sortir de l’aéroport. Le FPI s’est illustré dans le passé par ses raids violents contre les bars et autres lieux de sortie nocturne. De son côté, le Conseil des Oulémas, un organisme officieux, a fustigé les tenues «sexy et érotiques» de la star. Les organisateurs du concert, dont les 50.000 billets ont été vendus en deux semaines, ont rassuré les fans de Lady Gaga, appelés les «petits monstres», en expliquant qu’ils essayaient encore de convaincre les autorités. Sinon, Rangoon pourrait être intéressé…

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Indonésie Société

Indonésie : cachez ce short…

Les jeunes filles sont « encouragées » par la police à ne pas sortir en shorts. L’islamisation se renforce dans un pays qui compte près de 90% de musulmans.

Deux jeunes filles ont été réprimandées lorsqu’elles se sont présentées en shorts à l’entrée d’un stade pour y assister à un match de football. Les policières chargées du contrôle de sécurité leur ont demandé de se vêtir, la prochaine fois, de « tenues appropriées » afin « d’éviter la pornographie ». L’incident a été photographié et la police de Tangerang, municipalité limitrophe de Jakarta, a reconnu les faits.

Selon le Jakarta Globe, le porte-parole de la police municipale a rapporté que les policières avaient été invitées « à suggérer et à encourager » les filles « à ne pas porter de shorts parce que nous voulons éviter des choses indésirables ». Il a ajouté : « l’âge ne rentre pas en ligne de compte, seuls des vêtements appropriés comptent », a-t-il estimé. Les associations de défense des droits de l’homme ont protesté, estimant que les forces de l’ordre devraient protéger les femmes au lieu de « blâmer les victimes ». « Si elles interdisent aux femmes de porter des shorts, elles leur interdiront bientôt d’assister à des matchs de football et, pourquoi pas, de sortir de chez elles », a déclaré l’un de leurs représentants.