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Histoire Indonésie

Au cœur de Jakarta, rue Cendana, le souvenir de Suharto

Quatorze ans après la démission de Suharto et quatre ans après sa mort, Cendana est redevenue une rue comme les autres.

Voilà encore quatre ans, dans le quartier résidentiel de Menteng à Jakarta, à proximité de la grande place centrale de Monas, la rue Cendana était encombrée de rouleaux de barbelés et de chevaux de frise. Policiers et soldats étaient omniprésents. Les visiteurs de marque se succédaient pour aller saluer Suharto, le deuxième président de l’Indonésie (1966-1998), qui y occupait trois villas, aux numéros 6,8 & 10, dont les jardins communiquent.

Aujourd’hui, rapporte le Jakarta Post, les uniformes ont disparu, la rue est rouverte à la circulation et seuls quelques gardes et serviteurs demeurent sur place. Suharto (1921-2008) n’a jamais quitté cette demeure et aimait bien y recevoir des hôtes officiels pendant ses trente-deux années de règne et sa retraite. Certains de ses enfants continuent d’habiter dans les parages et envisagent de transformer en musée le domicile de leur père. La seule animation a lieu lors de la fête musulmane de l’Idul Fitri (Aïd el Fitr), quand Tutut, fille aînée de Suharto, y reçoit, selon la tradition des portes ouvertes, en particulier les anciens associés encore en vie de l’ancien autocrate.

Suharto avait ordonné l’éloignement de la chancellerie soviétique, qu’il estimait trop proche de sa demeure, et le site avait été transformé en QG de Paspampres (Force de sécurité présidentielle). Paspampres a déménagé depuis longtemps et Tommy, fils cadet de feu le président, y aménagerait son nouveau domicile. Cendana, l’adresse de «la famille», ainsi qu’on appelait le clan Suharto, a été la rue la plus célèbre d’Indonésie. Musée ou pas, elle appartient à l’Histoire.

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Culture Thaïlande

Provocation? Gaffe ? Lady Gaga n’en manque pas une

La tournée de la star en Asie du sud-est se poursuit en faisant des vagues. A Bangkok, elle suscite une nouvelle polémique.

A la suite de son séjour à Manille, sitôt arrivée à Bangkok à bord de son jet privé, le 23 mai, Lady Gaga a déclaré sur Twitter qu’elle allait profiter de son escale en Thaïlande pour acheter une «fausse Rolex». Ensuite, elle est allée voir un spectacle de transsexuels dans un cabaret. Elle a été assez emballée par la revue pour se rendre dans les coulisses, après le spectacle, pour féliciter les acteurs, selon le Bangkok Post.

Le public thaïlandais ne s’attendait sûrement pas à une attitude pareille. Le message sur Twitter a été qualifié «d’insultant et de mauvais pour l’image du pays», poursuit le Bangkok Post. Les Thaïlandais «ont tendance à être mécontents quand les étrangers mettent en relief le milieu minable de la pègre», a-t-il ajouté. Des propos indignés se sont répandus sur la Toile.

Mais Lady Gaga ne donne pas l’impression de s’en émouvoir. Elle est dénoncée par les chrétiens conservateurs en Corée du Sud et aux Philippines. Elle est  rejetée par les islamistes en Indonésie où son concert, le 3 juin, à Jakarta, est plutôt incertain, en dépit des cinquante mille billets vendus. Mais, pour l’instant, elle compte sur ses dizaines de milliers de «petits monstres» thaïlandais – plus quelques autres venus exprès des pays voisins – pour lui faire un triomphe dans la soirée du 25 mai.

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Asie Birmanie Indonésie Politique

En Asie du sud-est, deux Coréens qui ne se rencontrent pas

Le chef  de l’Etat (nominal) de la Corée du Nord est en Indonésie ; le président (élu) de la Corée du Sud est en Birmanie. Etrange ballet.

Le ballet est d’autant plus étrange que, voilà deux ans à peine, la Birmanie (Myanmar) n’avait d’yeux que pour Pyongyang et que les deux régimes étaient soupçonnés de collaboration nucléaire par les Occidentaux. Reçu par le président Thein Sein à Naypyidaw le 14 mai, Lee Myung-bak est, en outre, le premier chef d’Etat sud-coréen à se rendre en Birmanie depuis près de trois décennies : en 1983, l’un de ses prédécesseurs, Chun Doo-hwan, avait échappé de justesse à un attentat qui avait fait, à Rangoon, 21 victimes, dont quatre ministres sud-coréens. Trois Nord-Coréens avaient été arrêtés : l’un s’est suicidé en prison, le second a été pendu et le troisième est mort en détention en 2008. A l’époque, le dictateur Ne-Win avait rompu les relations diplomatiques avec Pyongyang (rétablies en 2007).

Il faut croire qu’avec le changement de gouvernement en Birmanie, les réticences des Sud-Coréens se lèvent. Leurs investissements se multiplient et une coopération officielle s’amorce. Le 15 mai, le président Lee a rendu visite à Mme Aung San Suu kyi à Rangoon.

Entre Jakarta et Pyongyang, il ne s’agit pas d’une alliance mais de relations qui remontent aux années 50. Si Kim Yong-Nam, 84 ans, président de l’Assemblée populaire suprême du Nord, en est à sa troisième visite en Indonésie, c’est bien parce que l’Indonésie entend maintenir un canal de communication avec le régime ermite dont les souverains, y compris l’actuel, Kim Jong-Un, ne prisent guère les voyages à l’étranger (à l’exception notoire de ceux en Chine).

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Indonésie Politique

Corruption: les députés indonésiens passent en tête

Selon les sondages, les institutions les plus corrompues d’Indonésie sont la police, la justice et le Parlement. Les élus semblent désormais l’emporter.

Les statistiques de la Commission pour l’éradication de la corruption (KPK) de l’Indonésie montrent qu’en 2012, «les législateurs sont en tête de la liste des gens inculpés pour avoir contrevenu à la loi et arrêtés en tant que suspects de corruption», rapporte le 8 mai le Jakarta Globe. «Six membres de la Chambre des députés et de celle des représentants de régions» sont actuellement impliqués dans des affaires de corruption, a déclaré Johan Budi, porte-parole de la KPK à Jakarta.

Le deuxième contingent de personnes inculpées pour corruption est fourni par les institutions privées. Le troisième est formé par les hauts-fonctionnaires et les autorités élues de province, comme les gouverneurs ou les maires. Pendant les quatre premiers mois de l’année, la KPK a récupéré l’équivalent de quelque deux millions d’€ volés à l’Etat.

A la suite de la réélection en 2009 de Susilo Bambang Yudhoyono (SBY), il y avait eu un débat public sur une «maffia judiciaire» de connivence avec des officiers de police. Peu de sanctions avaient été prises et le débat était retombé. Les deux Chambres ont été accusées, de leur côté, de dépenses inconsidérées, y compris dans des «voyages d’études» à l’étranger. Ces développements, ainsi que l’inaction de SBY, expliqueraient une désaffection croissante à l’égard des élites politiques.

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Indonésie Société

Lady Gaga et l’Indonésie: la polémique enfle

L’artiste au style peu conventionnel doit se produire dans un grand stade de Jakarta le 3 juin. Une milice islamiste lui reproche le «culte de Satan».

Plus de 30.000 billets – au prix de 35€ à près de 180€, ce qui est très cher en Indonésie – ont déjà été vendus pour le concert du 3 juin. Mais le FPI, ou Front pour la défense de l’islam, l’accuse de faire «la promotion du culte de Satan.» « Si vous voulez le chaos à Jakarta, maintenez le concert», menace Rizieq Shihab, patron du FPI, milice notamment connue pour avoir saccagé, voilà une dizaine d’années, les bars de la capitale.

Rizieq a fait de la prison. Mais il dispose de quelques appuis, notamment parmi des officiers à la retraite. En général, la police laisse le FPI prendre la loi entre ses mains : l’interdiction, par exemple, de réunions de chrétiens. Quant au gouvernement, la plupart du temps, il ne dit rien. Les miliciens du FPI, en robe blanche, sont de plus en plus impopulaires. Mais, jusqu’ici, dans un pays qui compte près de 90% de musulmans,  modérés dans leur immense majorité, le FPI bénéficie paradoxalement d’une quasi-impunité.

Que va-t-il se passer ? Les islamistes décrètent que les concerts de Lady Gaga sont «haram». Ils lui reprochent «son soutien aux homosexuels, aux lesbiennes, aux transsexuels». Comment vont réagir les «petits monstres», les fans de Lady Gaga, très nombreux en Indonésie ? Pour l’instant, ils «ronchonnent», rapporte le Jakarta Post. Le FPI s’est engagé, de son côté, à ne pas laisser sortir de l’aéroport l’artiste, qui vient d’entamer à Séoul une tournée de six mois. L’étape de Jakarta demeure néanmoins au programme.

 

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Expatriés

Une invasion d’expatriés à Jakarta

La crise mondiale qui perdure et la solide croissance de l’Indonésie se conjuguent pour encourager le débarquement de diplômés étrangers au chômage.

Le nombre des expatriés recrutés à Jakarta est passé de 59 577 en 2009 à 77 300 en 2011, selon des statistiques de la mairie citées par le Jakarta Post. Leur nombre pourrait passer le cap des cent mille dès 2012. Cet afflux d’étrangers en mal d’un emploi est sensible non seulement en Indonésie, l’économie la plus importante d’Asie du sud-est, mais également dans d’autres pays, notamment en Birmanie, en pleine ouverture sur le reste du monde.

Vice-président de l’Apindo, l’Association indonésienne des employeurs, Erwin Aksa estime que la présence d’étrangers sur le marché de l’emploi à Jakarta n’est pas un danger pour les travailleurs locaux, même si certains d’entre eux devront jouer des coudes pour ne pas perdre leur emploi. «Les fonctions de management et de direction dans certains secteurs, par exemple dans celui de la comptabilité, sont en question. La demande est très élevée alors que le nombre des locaux qualifiés pour les occuper est limité», a-t-il expliqué au Jakarta Post. «C’est l’une des raisons pour lesquelles de nombreuses sociétés préfèrent les expatriés, par exemple ceux venus d’Inde ou des Philippines. Ces derniers acceptent souvent des salaires inférieurs à ceux réclamés par les locaux dotés des mêmes qualifications», a-t-il ajouté.

Un chasseur de tête, Zen Smith, a constaté que des multinationales ont un préjugé favorable à l’égard des étrangers. C’est notamment vrai dans le secteur de l’information et des télécommunications (la préférence va aux Indiens) ou dans celui de la finance (les Philippins sont les favoris). Toutefois, ajoute-t-il, la présence de cadres expatriés sur le marché du travail à Jakarta a créé une «vive concurrence» qui est salutaire. Les compagnies, dit-il, ne peuvent plus en faire à leur tête, sauf à prendre le risque d’être «écartées».

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Indonésie Société

De plus en plus de fumeurs en Indonésie

Les bénéfices des grandes marques de cigarettes ne cessent d’augmenter en Indonésie. Et ce n’est pas fini.

Les campagnes et les mesures anti-tabac ont beau se multiplier en Indonésie, les fumeurs y sont de plus en plus nombreux. Rien n’y fait. En 2011, Aldi Rizal, âgé de 2 ans, avait fait sensation en consommant deux parquets de cigarette par jour (il a arrêté depuis). Plus de 400 000 enfants âgés de 10 à 14 ans fumaient en 2010 (contre 71 000 en 1995). Selon le Jakarta Globe, la Commission nationale pour la protection de l’enfance pense que leur nombre était le double voilà deux ans.

Selon le Jakarta Post, le premier fabricant de cigarettes, Hanjaya Mandala Sapoerna, a vu les recettes de ses ventes augmenter de 31,56% pendant le premier trimestre de 2012 (et ses bénéfices augmenter de 37,74% par rapport au premier trimestre 2011). Le deuxième fabricant national, Gudang Garam, a vu les siennes croître de 21,07% (et ses bénéfices de 10%).

L’une des raisons: alors que le pouvoir d’achat augmente régulièrement dans une économie à la croissance solide, le prix des cigarettes reste peu élevé, ce qui permet aux fabricants de reporter sur le consommateur le poids de taxes supplémentaires (déjà + 16% en 2012). Le paquet de cigarettes le plus populaire coûte moins d’un euro (contre plus de 3 € à Singapour). La deuxième raison : les mises en garde contre les effets du tabac sur la santé ont une influence encore très limitée. Dans le quatrième pays le plus peuple du monde, avec 240 millions d’habitants, deux cent mille individus sont morts en 2011 de maladies liées à la consommation de tabac.

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Indonésie Société

L’appel public à la prière: le débat s’ouvre à Jakarta

Le vice-président indonésien a dénoncé la cacophonie des appels à la prière à Jakarta. Politiquement incorrect ? L’accueil n’est pas pour autant négatif.

Qui se souvient de l’époque où Jakarta, capitale de la becak, feu le cyclo-pousse indonésien, était bercée par l’appel un peu lointaine du muezzin à la prière ? Depuis le milieu des années 80, des moyens plus puissants de diffusion,  la construction de centaines de mosquées supplémentaires, les appels préenregistrés à la prière, cinq fois par jour, à quelques secondes d’intervalle, ont fini par déboucher sur une cacophonie. Seule protection efficace : l’addition de double vitrages et de la climatisation,  privilèges de riches.

Le vice-président Boediono a pris son courage à deux mains et soulevé la question, le 27 avril, dans son discours d’ouverture du sixième Conseil des mosquées de l’Indonésie. «Trop bruyant», a-t-il dit, en réclamant des mesures pour limiter le son des haut-parleurs. Selon le Jakarta Post, Ahmad Suaedy, président de l’Institut Wahid (ONG musulmane prônant le pluralisme), l’a félicité d’avoir abordé un «sujet tabou».

Amidan, président de l’officieux mais influent Conseil indonésien des Oulémas, à majorité islamiste, a exprimé son désaccord tout en reconnaissant que les mosquées devraient s’entendre en ce qui concerne leurs appels, à l’image de ce qui se pratique au Caire depuis 2006.  En outre, selon une réglementation adoptée en 1978, les haut-parleurs extérieurs ne devraient être utilisés que pour les appels à la prière, en cas d’alerte ou pour les sermons exceptionnels lors de fêtes musulmanes. Ce qui n’est pas le cas.