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Birmanie Politique

Les Birmans préparent un accueil de héros pour Obama

La population de Rangoon s’apprête à faire un accueil triomphal à Barack Obama. Ambiance sur place.

Oubliez le pivotement des Etats-Unis vers l’Asie ou la rivalité Pékin-Washington, les habitants de Rangoon n’ont qu’un mot pour saluer la visite, le 19 novembre en Birmanie, du président américain Barack Obama : « Bienvenue ». Ce mot s’étale en couleurs vives dans les graffitis peints à la hâte, pendant la nuit, par des jeunes enthousiastes. Quelques magasins se sont mis du jour au lendemain à imprimer des tee-shirts à l’effigie du président récemment réélu et à fabriquer en masse des bannières étoilées. « C’est un grand honneur qu’il vienne ici. Il est le leader d’un très grand pays, donc je pense qu’il peut nous aider à améliorer notre pays », estime Aung Kyaw, un étudiant âgé de 20 ans à l’université de Rangoon, où le président américain doit prononcer un discours.

Même dans le marché Bogyoke Aung San, les commerçants font preuve d’un certain intérêt pour cette première visite dans l’histoire d’un chef d’Etat américain en Birmanie. « Obama a changé le monde. Et nous, nous sommes en train de changer selon la façon voulue par Obama. Nous pouvons donc attendre beaucoup d’aide des Etats-Unis », indique Kyi Thein, un changeur du marché assis sur un tabouret, une sacoche bourrée de devises diverses en bandoulière. En termes plus mesurés, les membres du gouvernement dirigé par le président Thein Sein se réjouissent aussi de ce rapprochement fulgurant : il s’est écoulé seulement une vingtaine de mois entre le début de l’ouverture birmane et la venue du président américain. Il est probable que peu de résultats tangibles interviennent dans la foulée de cette visite, d’une portée avant tout symbolique. « Peu importe ce qu’Obama dira dans son discours à l’université, ce sera de toutes façons un événement significatif », affirme l’analyste politique Khin Zaw Win.

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Analyse Asie Chine Politique

Sommet Asie-Europe: l’ombre grandissante de la Chine

Le sommet de l’Asem qui se tient les 5 et 6 novembre à Vientiane est l’occasion pour la Chine de s’affirmer comme puissance responsable.

Malgré les effets de manches, les Européens sont venus dans leurs petits souliers au sommet Asie-Europe, qui réunit les leaders d’une cinquantaine de pays des deux continents dans la capitale du Laos. Minés par une crise de la dette publique qu’ils n’arrivent pas à contenir et un euro assiégé de toutes parts, les chefs de gouvernement et d’Etat du vieux continent ne peuvent plus adopter la position de donneurs de leçons – un rôle qu’ils ont parfois donné l’impression de jouer lors de sommets précédents sur les questions de droits de l’Homme mais aussi de bonne gestion économique. Cette conjoncture joue en faveur de la Chine, qui, comme les autres économies orientées vers l’exportation d’Asie, subit le contrecoup des maux économiques et financiers européens.

Avec son poids économique et le crédit de sa monnaie, la Chine sait que sa réaction à la crise économique et financière européenne est déterminante. Et, selon une stratégie habile qu’elle avait déjà suivie en 2007-2008 en ne dévaluant pas le yuan, Pékin saisit l’occasion pour s’affirmer comme une puissance aussi incontournable que responsable, sachant que les Européens ne pourront qu’en être reconnaissants. Malgré un Congrès du Parti communiste Chinois qui doit commencer dans quelques jours, le Premier ministre Wen Jiabao est venu à Vientiane, au ravissement des dirigeants laotiens quelque peu fébriles de vivre le premier grand sommet international organisé sur leur sol.

Avec une Asie du Sud-Est en grande partie tournée vers la Chine, du moins au niveau économique, l’ancien Empire du milieu rayonne dans son habit de « grand frère ». Le ton de la presse chinoise est triomphaliste. L’agence chinoise Xinhua se gargarise de « rôle global sans cesse en expansion de Pékin » et de « soft power chinois ». Certes, les dirigeants philippins et peut-être d’autres tenteront-ils de mettre les tensions en mers de Chine orientale et méridionale sur la table, mais Pékin semble être, cette fois-ci, en position de dicter l’ordre du jour, qu’elle souhaite focaliser sur les questions économiques et de « dialogue civilisationel ».

Coopérer avec les Européens au niveau économique pour tenter de limiter les effets de la crise est une stratégie de bon sens aux yeux de Pékin. Le réengagement américain en Asie, perceptible sous la présidence de Barack Obama inquiète la Chine. La proximité entre l’opposition birmane – peut-être appelée à diriger le pays après les élections de 2015 – et les Etats-Unis n’est pas de bon augure pour la Chine. Alors que les militaires birmans pourraient bientôt assister aux manœuvres Cobra Gold organisées par les Américains et les Thaïlandais, le gouvernement birman suspend d’énormes projets d’investissements chinois. Les Européens, assez divisés sur les questions de politique asiatique, ne sont pas en train de « s’allier » avec la Chine. Mais, hypnotisés par la montée économique du géant asiatique, ils constituent une troisième partie, moins hostile envers Pékin et, parfois, défiante vis-à-vis de Washington.

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Analyse Asie Chine Politique Viêtnam

Vietnam : une diplomatie multipolaire, Russie comprise

En contrepoids à la puissance de son voisin chinois, le Vietnam a opté pour la multipolarité. Cette stratégie rend une place à la Russie de Vladimir Poutine.

Quelques mois après sa réélection, Poutine a accueilli, début septembre à Vladivostok, le sommet annuel de l’APEC (Asia Pacific Economic Cooperation) et en a profité pour rappeler que la Russie tenait à son rôle de premier plan en Asie-Pacifique. De son côté, le Vietnam a commencé à se réarmer face à la montée en puissance de la Chine, notamment en Mer de Chine du Sud. Il s’est donc adressé à Moscou, son pourvoyeur d’armes pendant la Guerre froide. En outre, la diplomatie multipolaire de Hanoï est freinée parce que la négociation d’un «partenariat stratégique» avec Washington traine en longueur.

Universitaire américain enseignant à Canberra et considéré comme un observateur averti du Vietnam, Carlyle Thayer estime que le «partenariat stratégique compréhensif», signé, le 27 juillet à Sotchi par Poutine et son homologue vietnamien Truong Tan Sang, s’appuie sur «quatre composantes majeures et de longue date» qui sont : «le pétrole et le gaz ; la coopération énergétique dans le domaine de l’hydroélectricité et du nucléaire ; l’équipement et la technologie militaire ; le commerce et l’investissement». Dans une analyse publiée sur le site d’East Asia Forum, Thayer ajoute trois domaines qu’il juge «importants» : «la science et la technologie ; l’enseignement et la formation ; la culture et le tourisme».

La Russie est ainsi devenue «le premier pourvoyeur d’armes, d’équipement et de technologie» du Vietnam. Les deux pays vont coproduire des missiles de croisière. Le Vietnam devrait commander davantage d’avions d’attaque Sukhoi Su-30. En août dernier, la Russie a lancé le premier des six sous-marins de la classe Kilo commandés par le Vietnam et qui seront livrés d’ici à 2015. Pour procéder à la maintenance du matériel et à la formation des équipages vietnamiens des sous-marins, les Russes auront accès au complexe aéroportuaire de Cam Ranh, aménagé par les Américains et où les Soviétiques se sont installés de 1978 à 2003.

Concernant le pétrole, le gaz et l’énergie, les Russes ont hérité d’une société d’économie mixte formée par les Soviétiques en 1981 : Vietsovpetro est devenue Rusvietpetro. Moscou a également accordé à Hanoï un crédit de près de 8 milliards d’€, dans des conditions avantageuses, pour construire sa premier centrale nucléaire (Ninh Thuan 1).

La Russie est devenue, en 2001, le premier partenaire stratégique du Vietnam . Que «leurs relations bilatérales se soient développées progressivement jusqu’au niveau de partenaires stratégiques compréhensifs est un développement naturel», estime Thayer. Toutefois, après 2001, Hanoï a passé des accords de partenariat stratégique avec plusieurs Etats : «Japon, Inde, Chine, Corée du Sud, Espagne, Royaume-Uni, Allemagne». Surtout, le Vietnam a attendu d’avoir signé, en 2009, un accord de partenariat compréhensif avec son puissant et redouté voisin chinois pour en faire autant avec Moscou.

Ces développements annoncent des manœuvres serrées et délicates. Pour les Russes, Pékin et Hanoï sont de gros clients dans le domaine de l’armement. Mais les Chinois doivent voir d’un mauvais œil Moscou renforcer «les capacités de défense du Vietnam et lui permettre de développer sa propre version de l’interdiction de l’accès à l’archipel des Spratleys», où les deux Etats disposent actuellement de bases (avec la Malaisie et Taïwan, deux autres pays riverains).

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Politique Viêtnam

Sept ans de prison confirmés pour un dissident au Vietnam

Une Cour a rejeté l’appel d’un défenseur des droits des paysans. Trois autres dissidents, des bloggeurs, attendent leur traduction devant un tribunal.

Nguyên Ngoc Cuong, 56 ans, avait fait appel de sa condamnation en octobre 2011 pour «distorsion des politiques de l’Etat et du parti». Le Nhân Dân, quotidien du PC vietnamien, vient d’annoncer que cet appel avait été rejeté. Son fils Nguyên Ngoc Tuong Thi a vu sa peine de deux ans de prison réduite à 18 mois. Arrêtés en mars 2011 pour avoir pris le parti de paysans dans des disputes foncières dans la province de Dông Nai, proche de Hô Chi Minh Ville, le père et le fils ont été notamment accusés d’avoir distribué plus d’un millier de tracts «anti-gouvernementaux».

Entre-temps, on est sans nouvelle du procès de trois bloggeurs qui ont fondé, en septembre 2007 au Vietnam, le Club des journalistes libres (septembre 2007). Nguyên Van Hai, 60 ans, a été arrêté en avril 2008 pour avoir participé à plusieurs manifestations antichinoises. L’avocat Phan Thanh Hai, 43 ans, a été arrêté le 18 octobre 2010 pour propagande contre l’Etat. Quant à Ta Phong Tan, 44 ans, ancienne officier de police qui a été radiée des rangs du PC, elle a ouvert son blog «Justice et vérité» en 2006 et a été internée le 5 septembre 2011.

Leur procès devait avoir lieu à Ho Chi Minh Ville le 17 avril. On ignore ce qui s’est passé. Il a peut-être été repoussé en raison des festivités marquant le 37ème anniversaire, le 30 avril, de la victoire de 1975. Autre possibilité : le rapprochement de Hanoi avec Wahington inviterait à la discrétion concernant la répression des dissidents.

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Asie Politique

Le fiasco nord-coréen

Le missile lancé par la Corée du nord, tôt dans la matinée du 13 avril 2012, s’est aussitôt abimé, selon Séoul, Tokyo et Washington.

L’annonce d’un tir nord-coréen avait inquiété l’Asie et contraint au détournement d’une vingtaine de vols commerciaux. Toutefois, selon un porte-parole du ministère sud-coréen de la défense, la roquette – de type Unha-3 et lancée à Sohea, près de la frontière chinoise – «s’est désintégrée en plusieurs morceaux et a plongé plusieurs minutes après son décollage». Washington et Tokyo ont également évoqué un échec et confirmé qu’il s’agissait d’un missile de portée intercontinental et susceptible, à terme, de transporter une tête nucléaire. Pyongyang affirme que l’essai avait pour objet de placer en orbite un satellite (les deux essais précédents, en 1998 et en 2009, ont également échoués).

Pour la première fois, plus d’une centaine de journalistes étrangers ont été invités à assister au lancement ainsi qu’à la célébration, le 15 avril, du centième anniversaire de la naissance de Kim Il-Sung, fondateur du régime et grand-père de Kim Jong-Un, l’actuel leader nord-coréen. Le Conseil de sécurité de l’ONU doit se réunir rapidement pour réagir à ce que beaucoup considèrent comme une violation d’une résolution adoptée en 2009, après le deuxième essai nord-coréen. Les Etats-Unis, qui ont menacé de suspendre leur aide alimentaire à la Corée du Nord, estiment que le fiasco prouve l’efficacité de sanctions qui ont empêché Pyongyang de compléter son programme.