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Politique Viêtnam

Vietnam : deux députés réclament la démission du premier ministre

En séance plénière de l’Assemblée nationale, deux députés ont réclamé la démission de Nguyên Tân Dung, chef du gouvernement depuis 2006. Le fait est sans précédent.

Duong Trung Quôc, député de la province de Dông Nai, limitrophe de Hochiminh-Ville, a demandé si le premier ministre jugeait nécessaire ou non d’amorcer une «culture de démissions» concernant les officiels de haut rang et les dirigeants de l’Etat, selon le quotidien anglophone Vietnam News. Historien qui appartient à la petite minorité de parlementaires non-communistes, Quôc aurait ajouté, selon le Bangkok Post, qu’il était temps que Nguyên Tân Dung « prenne vraiment ses responsabilités et ne se contente plus de s’excuser». «Les gens se demandent pourquoi il semble que le premier ministre n’attache pas autant d’importance à ses responsabilités vis-à-vis du peuple qu’à l’égard du Parti», aurait-il dit.

Ces remarques publiques, au cours d’une séance plénière de l’Assemblée nationale à Hanoï le 15 novembre, se sont répandues sur la Toile comme une trainée de poudre. Un autre député, Nguyên Ba Thuyên, originaire du Sud, ce qui est également le cas de Dung et de Quôc, a déclaré de son côté que l’incapacité du premier ministre à régler les problèmes économiques du Vietnam a mis en cause la crédibilité de la direction communiste.

Les attaques publiques et frontales sont très rares au Vietnam. En octobre, à la suite de plusieurs scandales financiers et d’arrestations de dirigeants dans les milieux bancaires et les entreprises publiques, un plénum du Comité central du PC s’est réuni pendant quinze jours, une longueur exceptionnelle. A la suite de ces discussions, le premier ministre a présenté, devant l’Assemblée nationale, des excuses pour les manquements et les faiblesses de sa gestion économique. Les interventions des deux députés laissent toutefois penser que la crise politique n’a pas pris fin avec l’autocritique du chef du gouvernement.

Nguyên Tân Dung a répondu avec calme qu’il n’avait pas caché les insuffisances de sa gestion et que c’est le parti qui lui avait donné pour mission, en 2011, de continuer dans les fonctions de premier ministre. Pendant des années, le Vietnam a connu un taux de croissance annuel moyen de 8%. Mais ce taux a nettement baissé et ne serait que de 5,2% en 2012. Des milliers de petites entreprises ont fait faillite ou sont menacées de banqueroute. Le secteur immobilier est en crise. Enfin, plusieurs entreprises publiques affichent d’énormes dettes et des déficiences apparemment liées à la corruption.

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Politique Viêtnam

Vietnam : projet de réorganisation au sommet de l’Etat

L’Assemblée nationale étudie des projets d’amendements de la Constitution de 1992 susceptibles de renforcer les pouvoirs du chef de l’Etat. Rééquilibrage ?

Les effets politiques de la crise financière au Vietnam n’ont pas fini de se faire sentir. Si l’on en croît le site de Tuoi Tre, Phan Trung Ly, président de la Commission législative, a lu à haute voix le 29 octobre, devant l’Assemblée nationale réunie en séance plénière à Hanoï, neuf propositions d’amendements à la Constitution de 1992.

Si ces amendements sont votés, les pouvoirs du chef de l’Etat seront renforcés. En tant que président de la République socialiste, il «dirigera les forces armées et détiendra les fonctions de président de la Commission de la défense nationale et de la sécurité». Il sera chargé de nommer les généraux, les amiraux, les chefs d’état-major et les présidents du Département politique de l’armée populaire.

Le chef de l’Etat, poursuit Tuoi Tre, dispose aussi, selon le projet, du pouvoir d’annuler les décrets «du gouvernement ou du Premier ministre pour assurer l’unité du système légal. Le président a également le droit d’assister au conseil des ministres». Enfin, est réaffirmé le droit du président, qui figure déjà dans la Constitution (art. 103), «de recommander à l’Assemblée nationale d’élire ou de démettre les vice-présidents ou le premier ministre».

L’actuel chef de l’Etat est Truong Tan Sang, N° 2 du bureau politique du PC, et le Premier ministre Nguyen Tan  Dung, N° 4. Tous les deux sont originaires du Sud et âgés de 64 ans. Ils passent pour être des concurrents et ce serait pour les départager qu’en 2011, Nguyen Phu Trong a été nommé Secrétaire général du PC (et N°1 de son politburo).

Depuis, la crise financière aurait exacerbé les divergences. Plusieurs hommes d’affaires, banquiers et même des dirigeants d’entreprises publiques ont été placés sous les verrous. Plus récemment, fait inhabituel, dans un discours prononcé devant l’Assemblée nationale, le Premier ministre a reconnu des erreurs de son gouvernement dans la gestion de la crise. Il est toutefois très difficile de mesurer l’éventuelle incidence des amendements en discussion. L’Assemblée nationale, écrit encore Tuoi Tre, doit leur consacrer deux séances, les 6 et 15 novembre prochains.

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Société Viêtnam

Trafic routier: amendes et corruption

Augmenter les amendes pour violation du code de la route peut renforcer la corruption. Un dilemme débattu à l’Assemblée nationale du Vietnam.

Face à la congestion croissante de la circulation et à la multiplication des accidents de la route au Vietnam, le vice-ministre des Transports Lê Manh Hung a demandé aux députés l’autorisation d’augmenter le prix des amendes payables sur le champ jusqu’à deux millions de dôngs (70€), soit dix fois l’amende maximale en cours. De son côté, un haut fonctionnaire du ministère de la Sécurité, Do Dinh Nghi, a suggéré qu’en cas d’activités menaçant le bien-être public, comme les courses illégales, les véhicules devraient être confisqués. «Si cette proposition n’est pas approuvée, il sera très difficile pour nous de gérer les violations», a-t-il ajouté, selon le quotidien Tuoi Tre.

Mais les élus ne sont pas convaincus, rapporte un autre quotidien, Thanh Nien. Dang Dinh Luyên, vice-président de la Commission des lois, estime que le gouvernement doit prendre en considération le fait que, si les amendes sont trop élevées, beaucoup de fauteurs ne pourront pas y faire face. Ou le fait que la police devra assurer la garde du véhicule pendant que le contrevenant réunit les deux millions de dôngs.

Nguyên Ba Thuyên, député de la province de Lam Dông, a fait valoir que plus l’amende sera élevée, plus les auteurs d’infraction et les policiers seront tentés de recourir à des «dessous de table». D’un autre côté, plutôt que de renforcer les effectifs de la police, mieux vaudrait recourir à des moyens techniques comme les radars et caméras. «Je pense qu’ajouter des gens ne fera que renforcer le risque de corruption», a-t-il affirmé. 70.000 contraventions ont été rapportées en 2011. Ce chiffre est 2,3 plus élevé qu’en 2010 mais demeure insignifiant dans un pays où les accidents de la route font, chaque année, des milliers de victimes. La plupart des infractions se règlent donc à l’amiable et ne sont pas rapportées. Le dilemme est loin d’être résolu.

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Politique Viêtnam

Corruption officielle : des élus vietnamiens s’exaspèrent

A la suite des scandales qui ont éclaboussé deux entreprises publiques, Vinashin et Vinalines, les députés vietnamiens s’interrogent  sur la corruption officielle.

«Des fils de mandarins» pourris par l’indulgence de l’Etat. Tel est le jugement porté en séance plénière par Lê Nhu Tiên, vice-président de la commission pour l’éducation et la culture de l’Assemblée nationale, sur les anciens dirigeants de ces deux entreprises d’Etat, aujourd’hui emprisonnés ou en fuite. «Nous étions prêts à financer leurs actions sans tenir compte de leurs capacités. Chaque fois qu’ils étaient confrontés à des difficultés, l’Etat était prêt à jeter de l’argent pour les secourir. Aussi, ils étaient contre les privatisations»,  a-t-il estimé, le 7 juin, lors d’un débat à Hanoi sur les méfaits de la corruption. «Après Vinahsin, il y a eu Vinalines ; les électeurs s’inquiètent désormais de savoir s’il y aura d’autres Vina…», a-t-il ajouté.

Certains élus ne cachent plus leur exaspération face aux abus. «La corruption n’est même plus discrète», estime Lê Nam, député du Thanh Hoa (Vietnam central). Selon un compte-rendu de cette séance publié sur le site Vietnamnet.net, Nguyên Van Tiên, élu de Tiên Giang (sud) a déclaré que les gens n’osaient plus se rendre à l’hôpital en raison des pots-de-vin réclamés par les médecins. Il a dénoncé la culture des «cadeaux»,-  pour dire «merci»,  à l’occasion d’ «un anniversaire, d’une crémaillère, d’une promotion». Les cadeaux, a-t-il dit, peuvent coûter des dizaines de milliers d’euros : carte de crédit, voyage à l’étranger de toute la famille, limousine, appartement de luxe.